Where the wild roses grow [Pv Namrod]

Aviana n’aimait pas cette pièce. Une vaste véranda sous une charpente de verre, des montants de cristal et des meubles translucides, lisses et sans âme. Là où d’autres voyaient un écrin elle n’imaginait que les murs d’une prison que la transparence rendait bien trop visible. Acculé, le lierre courait le long des murs véritables, d’une pierre froide et brute sur laquelle il n’était pas permis de poser la main, en raison de l’architecture trop préservée des lieux. En cela, cette pièce était aussi aseptisée et fausse que bien des bâtiments humains, et ne trouvait aucune miséricorde dans l’âme de la reine faë.

Il y avait pour autant une raison définie au choix de cette pièce. Elle ne seyait pas aux songeries dont on accablait volontiers la reine, lui prêtant des moeurs plus légères qu’une plume dans le vent. Si l’exotisme rendait séduisante l’idée qu’elle ait pu se perdre à la cour de l’ombre, la véranda étriquée n’avait rien d’attrayant pour agiter les esprits. A recevoir le capitaine de sa garde dans un boudoir confortable, sa cour aurait certainement jasé, ce qui lui aurait attiré les foudres de son souverain.

Délicat équilibre et cruelle alchimie que celle des corps offerts l’un à l’autre sous le regard du peuple. Parfois, Aviana regrettait d’avoir jamais fait sien le faë qui l’avait séduite il y a des années de cela, avant même que la cour de lumière ait trouvé sa voie. Et pour autant, il lui fallait jouer finement, encore et toujours, car si elle se mettait à dos l’un de ses faës les plus fiables et les plus fidèles sa situation s’en trouverait dangereusement compliquée.

Car la reine avait des desseins moins resplendissants que ne désirait le penser sa cour, et si la chose n’était pas gênante en soi, mieux valaient pour tous que certaines exactions ne soient pas sues, et ne fussent rien de plus que des regrets lâchés au vent.

Et la reine patientait, affalée sur un siège translucide, d’un style épuré et moderne, dont l’effet se voyait gâché par la mise improbable de la reine. Aviana portait une grande veste aux manches larges le longues, lesquelles coulaient en cascade de soies sur ses genoux, masquant une robe courte et près du corps qu’elle portait en dessous. A son cou et à ses oreilles, étincelaient des bijoux d’or, aussi onéreux et ostentatoires que son stupéfiant habit.

La souveraine se plaisait à feindre l’ennui, à prétendre qu’on l’avait fait attendre une semi-éternité alors qu’elle était seule coupable d’avoir tardé à faire mander le capitaine des gardes. Elle ne lui avait fait transmettre aucun détail, le laissant libre de se tourmenter l’esprit, de s’interroger sur le motif de cette entrevue. Croirait-il qu’elle courrait un danger qu’il n’aurait su prévoir ? Aviana fit la moue à cette pensée, elle avait toujours détesté passer pour une jouvencelle en détresse.

Sans rien de plus à faire qu’emmêler le bout de ses doigts dans une torsade de cheveux blonds, elle attendait l’arrivée du capitaine, s’interrogeant sur ce qu’elle lui dirait ou non, sur la pertinence de le mêler à ses projets. Elle acquit rapidement la quasi-certitude qu’il eut mieux valu ne rien lui dire du tout, un pion aveugle étant toujours plus obéissant qu’il ne pouvait envisager d’autres chemins à emprunter.

Mais Aviana était ainsi , à ne pouvoir se satisfaire d’une existence simple et aisée, qui n’aurait pas inclus de courtiser certaines chimères.

Les lacets de son armure de cuir pâle moucheté d’or étaient défaits. Namród glissa une main au-dessous de la cuirasse, au-dessous de la chemise, effleurant son flanc d’un geste languissant. Graye frissonna à ce contact et, abandonnant une seconde les lèvres de son amant, rejeta sa tête en arrière. Il exhala un long soupir. Son opulente chevelure avait été détachée et tombait en cascade sur ses épaules. En émanait un doucereux parfum de lys dont Namród aimait s’enivrer.
Son lieutenant était venu le prévenir : sa Majesté exigeait sa présence. Il s’était présenté à lui, droit comme un i, à croire qu’il s’efforçait d’arborer une expression officielle. Hélas le charme de Namród avait opéré et le jeune homme y avait succombé. Voilà comment le messager de sa Grâce Aviana de Blanval avait fini sa course blotti contre le torse de son capitaine, à jouir de ses caresses expertes. Namród brûlait d’une furieuse envie de le prendre, là, tout de suite. Et cette envie était manifestement réciproque, le haut-de-chausse du jeune homme s’étant déjà déformé.
– Vous faites attendre la reine…, murmura-t-il, dénué de conviction.
– J’aime à lui enseigner la patience, répondit Namród en délaçant son haut-de-chausse.
Graye l’en empêcha en mettant une main sur la sienne.
– J’en meurs d’envie, avoua-t-il. Mais…Ce doit être important.
Namród le dévisagea, la mine perplexe. Ses sourcils s’étaient légèrement froncés.
– Crois-tu ?
Un sourire cruel flotta sur ses lèvres.
– Qui vais-je choisir ? Quelle méchanceté ce serait, de t’abandonner-là à la flamme de ton désir. Mais il s’agit de ma reine, je dois répondre à son appel.
Et il se détourna de lui.
– Attends, s’exclama Graye en s’élançant à la suite.
Empoignant sa main, il l’attira à lui et l’embrassa passionnément. Namród mit ses mains en coupe et recueillait son visage juvénile. Il le maintenait à sa merci, et Graye se soumettait volontiers. Leurs langues s’entremêlaient en un ballet sensuel. Finalement, Namród s’écarta, un ultime filet de salive brûlante les liant ensemble.
– Je dois y aller, se résigna-t-il. Sois tranquille, la seule image de ta nudité m’encouragera à la prestesse.
Il abandonna son amant au supplice d’un désir inassouvi et emprunta le chemin de la loggia. Les longs couloirs de l’hôtel des Songes d’une nuit d’été réverbéraient le claquement de ses pas. Une lumière vive filtrait des verrières en cristal et, en caressant le visage du capitaine de la garde, révélaient sa bonne humeur. Namród aimait sentir la chaleur des rayons du soleil et se gorger de leur lumière. Car au-delà de sa race, il était un Fay lumineux affilié à Alextrasza, la Lumière et la Vie incarnée. Il croisa quelques gardes en faction qui le saluèrent d’un signe de tête. Deux d’entre eux gardaient la porte de la loggia. Ils étaient vêtus d’une armure légère, subtil mélange de cuir et d’argent, et tenaient chacun une hallebarde gravée de sighils magiques. Face à leur capitaine, ils baissèrent les yeux et ouvrirent la grande porte.
La reine était nonchalamment assise dans un fauteuil translucide. Namród s’avança vers elle et, malgré qu’elle lui tournât le dos, il mit un genou en terre. S’il l’avait délibérément faite attendre, il n’en trahissait moins de respect envers elle.
– Ma reine, dit-il. Vous m’avez fait mander ?

L’esprit d’Aviana vagabondait depuis bien longtemps quand le capitaine de sa garde parut. Elle aurait pu lui tenir rigueur pour son retard. Elle aurait même dû, susurrait une petite voix pernicieuse dans les tréfonds de son âme, mais la vérité était qu’elle n’en avait cure. Pareil aux fauves assoupis attendant les heures froides, sa notion du temps s’était étiolée pour laisser place à une douce mélancolie.

« Oui. » répondit la reine, avant l’inviter à prendre siège sur l’autre fauteuil transparent. Quelques mots polis, l’esquisse d’un signe du bout des doigts, et seulement, lorsque Namród fut largement entré dans son champ de vision, elle daigna poser les yeux sur lui.

C’était à ses yeux un faë des plus fabuleux, un exemple à suivre pour ses pairs. Il se dégageait de lui un charme indéniable, la même aura de puissance impertinente qu’avait Jacelyn, qui l’avait jadis fait tomber dans les bras de son époux. C’était l’une des raisons pour laquelle Jacelyn désapprouvait qu’elle usa de Namród pour davantage que sa stricte protection, comme si des entrevues répétées pouvaient… Compliquer les choses.

La reine n’en avait cure. Elle avait de nombreuses raisons de pousser Jacelyn à l’insatisfaction, et si toutes n’étaient pas honorables, un tête-à-tête avec Namród restait un moyen plutôt gentil de leur donner substance.

« J’aurais besoin de vos services et de votre discrétion pour une mission… particulière. »

La reine avait ponctué sa phrase d’un sourire ravageur, qui rappelait sans un mot que la discrétion à son sens n’excluait que son époux. Qu’il passa par le bureau du patron de Pinxit et Aviana n’aurait pas même levé un sourcil.

« J’avais pensé qu’il vous serait peut-être possible de vous rendre en ville. Les humains sont parfois sots et ennuyeux, persuadés que nous autres faës sommes des aberrations, mais j’aurais besoin que vous rencontriez l’un d’entre eux. »

Aviana croisa le regard de Namród. En sa générosité, elle lui laissait le droit d’exprimer des réserves, de protester que sa mission l’attachait à sa protection, non à crapahuter dans les rues de la ville, mais quelque chose, dans la dureté insolente de ses prunelles, clamait qu’elle ne manquerait pas de balayer ses réticences d’un revers de main.

Namród s’installa face à sa reine. Sans qu’il ne le remarquât, il restait fidèle à lui-même : il s’était mis à son aise, et l’élégante désinvolture de sa tenue trahissait son aisance qu’importe la situation. Sa jambe gauche était repliée et en équilibre sur la droite. Il s’était enfoncé dans son siège et, les coudes rivés aux accoudoirs, gardait ses mains jointes. Néanmoins son visage affichait une mine sévère. Il était à l’écoute de sa reine.
– J’aurais besoin de vos services et de votre discrétion pour une mission… particulière.
Dame Aviana ponctua sa phrase d’un sourire éloquent. Namród saisit immédiatement le sens du terme « discrétion » qui, évidemment, n’impliquait en aucun cas ses capacités franchement discutables en matière d’infiltration. Qu’a-t-elle encore prévu d’infliger au roi Jacelyn ? Se demanda-t-il à juste titre.
– Je vous écoute.
Et il écouta.
Elle lui imposait une nouvelle mission en extérieur. Lui, le capitaine de sa garde. Lui, son meilleur protecteur. Comme de coutume, Namród brûlait d’une furieuse envie de protester. Cela dit il s’abstint, bien que l’expression de son visage ne le trahît. On y lisait une désapprobation certes muette, mais d’une évidence certaine.
Namród était habitué à ces sorties. Dame Aviana aimait à lui confier ses missions de haute importance, ainsi que l’administration de sa sommaire justice. Il les exécutait consciencieusement à défaut de bonne grâce.
Un sourcil se haussa.
– Et qui est donc cet heureux élu ? Demanda Namród.
Il s’attendait à un nom d’une certaine éminence, au moins cela ! Car sa reine ne l’enverrait courir les bas-fonds en quête d’un va-nu-pieds…n’est-ce pas ? Namród s’efforçait de s’en persuader.
– Je serai également curieux de connaître tout le sens du terme « rencontrer »…
Un sourire entendu flotta sur ses lèvres. Effectivement, « rencontrer » avait bien des sens. Et il était évident qu’on n’envoyait guère un chevalier la trempe de Namród discuter des choses de la vie autour d’un verre de liqueur. Ou du moins, c’était d’une notable rareté.
Il décroisa les jambes et, s’inclinant vers la reine comme s’il s’apprêtait à l’abreuver de confidences, il ajouta :
– Ou ce qu’il adviendra de cette rencontre. Car si vous m’envoyez moi, c’est que notre humain est, ma foi…quelqu’un de difficile.
Je me trompe ?

Aviana ne s’offusqua pas du peu de formalisme de Namród. S’il y avait des us à respecter à la Cour de Lumière, ceux-ci n’avaient lieu d’être que quand elle le désirait. Drapé dans une insolente princière, le capitaine de la garde lui rappelait son resplendissant époux, à l’époque où il pouvait concevoir de plier à ses désirs sans sourciller. Un temps où Jacelyn lui était bien moins déplaisant.

D’un geste las, comme si cette conversation l’éreintait, la reine avait laissé choir la mèche de cheveux qu’elle cueillait dans sa pomme pour y poser la tête, et jeter un regard de biais à Namród. Elle l’appréciait, pas à la manière des trophées pour qui elle écartait les rideaux de sa chambre, bien qu’il fut un délice pour les yeux, mais il était du nombre de ceux qu’il lui plaisait d’avoir à son service. Eut-il offensé l’une des trop nombreuses règles cruelles qu’elle les eut probablement modifiés par caprice. Peut-être était-ce cette faveur tacite que Jacelyn lui jalousait.

Ou peut-être le roi faë était-il assez lucide pour se rendre compte que, par la facilité avec laquelle il s’inclinait devant la volonté versatile de la reine, Namród devenait l’incarnation même de ses dangereux caprices.

« Je m’en moque, tant que vous ne lui révélez pas le chemin menant à notre cour. Il ne fera pas de manière avec vous. J’ai juste besoin que vous trouviez quelqu’un. »

Prononcé par la reine, ce quelqu’un ne renvoyait pas simplement à n’importe qui, il distillait une once de dédain tenace, lequel stipulait à lui-même qu’elle cherchait un cobaye, une âme sotte et fragile, une chose qui ne manquerait à personne et que personne ne viendrait à pleurer si elle devait se briser.

« Vous n’auriez rien de plus à faire que de veiller à lui faire boire une gorgée de ceci. »

Aviana tira d’une poche intérieure une petite fiole de verre ouvragée, si finement ciselée qu’elle évoquait davantage un flacon de parfum qu’un breuvage. Le liquide en était transparent, brillant dans sa prison de verre comme la rosée du matin.

« Il se pourrait alors que votre cible se trouve une affection toute particulière pour la première personne à sa portée. Vous n’êtes pas obligé de vous sacrifier. Je ne vous l’interdis pas, mais je doute que des êtres à même de mériter vos charmes courent les rues de cette ville. »

Un sourire moqueur apparut sur les lèvres de la reine.

« Mais tout cela ne sera que pure formalité. Vous n’aurez pas grand peine à dénicher un gosier assoiffé. Poison est un bien vilain mot, mais disons que l’élixir fonctionne, je n’ai pas de doute là-dessus. »

Aviana était plutôt bien placée pour le savoir.

« Ce que je veux savoir, c’est si l’élixir peut fonctionner deux fois. Se savoir sous l’emprise d’un poison ne suffit pas pour en annihiler les effets, mais même le plus saoul des hommes peut décider de s’asseoir sur son séant et de cuver jusqu’au lendemain. Il vous faudra donc veiller à ce que votre cobaye ait toute liberté de sombrer dans les bras de la même personne la seconde fois, et de me rapporter si l’expérience a fonctionné ou non. »

Le regard de la reine s'attarda sur le capitaine de la garde, un silence éloquent qui soulignait ce qui n'avait pas besoin d'être dit : Jacelyn ne devait pas être au courant.

« N’utilisez l’élixir à l’encontre d’aucun faë. Vous n’en avez pas besoin. »

Pas plus qu’elle n’en avait besoin. Le refus faisait partie du jeu de la séduction, et la reine s’était déjà surprise à rire de ceux qui refusaient ses faveurs, par peur, par loyauté, ou pour toute autre sage raison qui leur défendait de poser la main sur la reine de la cour de lumière. Caïn, cerné de monstres sans âmes dans une cour dépourvue de grâce ou de beauté, n’avait pas le droit de se détourner d’elle. Car au delà de l’insulte, qui savait ce que l’âme noir du roi d’ombre pouvait forger dans sa triste tanière ?

« Je vous interdis également d’en boire vous-même. Je risquerais d’être jalouse que cela n’ait pas été en ma compagnie. »

La reine avait ponctué ces mots provocateurs d’un sourire narquois, c’était le genre d’allusions gratuites dont elle se plaisait à gratifier les faës qui lui plaisaient avec l’espoir mesquin que les espions de son époux lui rapporteraient ses mots.

« Et ne vous inquiétez pas pour moi. Rien ne peut m’assaillir en ces lieux sinon l’ennui. »[/color]

Et l’ennui de la reine était des plus redoutable, car personne en ce monde n’avait jamais su la protéger d’elle-même.

Spoiler:

– J’ai juste besoin que vous trouviez quelqu’un.
Namród haussa les épaules, une évidente façon de dire « comme vous voudrez, moi-même je m’en moque éperdument. » Cela dit, l’expression de la reine lui déplaisait. Namród Felyndrel n’était pas de ces mercenaires qui acceptent n’importe quoi en échange de sonnaille ou de faveur vicieuse. Pourquoi devrait-il se coltiner une basse besogne que n’importe quel imbécile à la patte bien graissée saurait réaliser ?
Malgré ses réticences, Namród écouta attentivement sa reine.
– …je doute que des êtres à même de mériter vos charmes courent les rues de cette ville.
La reine eut un de ces sourires foncièrement moqueurs à cette remarque, et Namród y répondit volontiers. Ses yeux pétillaient de malice. Savait-elle, pour Graye ? A vrai dire, c’était d’une évidence…Ce brave garçon perdait ses moyens devant son capitaine. Et les rumeurs allaient bon vent à la cour de lumière. S’il n’avait absolument aucune considération pour lui, Namród lui aurait immédiatement refilé ce damné poison et se serait affranchi aussi simplement de sa tâche…mais il aimait Graye, et Graye l’aimait en retour. Cela n’avait donc aucun intérêt si ce n’est une cruauté gratuite.
– N’utilisez l’élixir à l’encontre d’aucun faë. Vous n’en avez pas besoin.
Eh bien, voilà qui dissipait toute fomentation discutable à l’égard des membres de sa garde. Même si, effectivement et sans l’ombre d’un excès de vanité, Namród n’en avait nullement besoin.
Il saisit la fiole et en observa un moment le contenu translucide, un sourcil haussé en une mine dubitative. A quel jeu vous livrez-vous donc, ma reine ? Si ce n’est à votre bon plaisir, à qui est destiné cette liqueur du mensonge ?
– Je vous interdis également d’en boire vous-même. Je risquerais d’être jalouse que cela n’ait pas été en ma compagnie.
Le regard de Namród glissa de la fiole à la reine, la fixant d’un air amusé.
– En ce cas, qu’attendons-nous ?
Et si nous tentions l’expérience immédiatement ?
– A moins que vous ne cherchiez à me séduire de vous-même. Voilà un jeu auquel j’aime me livrer.
Même si je préfère les hommes. Chut, allons, c’est un secret.
Namród s’abandonna à nouveau à une contemplation de la fiole. Il voulait connaître les intentions de sa reine. Après tout, en tant que capitaine de sa garde, n’était-il censé être mis dans la confidence ?
– Je me demande…quel malheureux fera les frais de ce…test.
Car je doute que tout ceci soit un moyen de remédier à votre ennui.

[HRP/ Désolé, si j’avais eu idée du n’importe quoi dans lequel sombrerait ce rp lorsque je l’ai amorcé je t’aurais prévenu… XD /HRP]

Namród l’avait bien trop écouter sans mot dire pour ne pas camoufler une certaine résignation. Aviana s’en moquait comme d’une guigne. Elle régnait sur un peuple arrogant, prompt à considérer la moindre attention comme légitime et due. De fait, ils n’avaient pas besoin d’être chéris comme les joyaux qu’ils étaient.

Rien ne l’obligeait à utiliser Namród, mais la perspective d’irriter son époux - en attirant au passage son attention sur la mauvaise cible - tout en faisant jaser sa cour à son profit, était plus que séduisante. Et puis elle avait vraiment besoin de savoir, pour l’élixir...

Les rumeurs allaient bon train concernant le capitaine de la garde. La moitié d’entre elles était probablement tissée de mensonge, mais la part restante était plus que suffisante pour supposer que Namród n’avait pas besoin de tricher pour trouver compagnie. La franchise du sourire qu’il lui rendit corrobora les suppositions de la reine.

Aviana répondit à la provocation par un sourire énigmatique. Elle n’avait pas l’habitude de chercher ses amants dans le cercle trop restreint de ses gens de confiance. La reine redoutait assez peu de fragiliser ses appuis par des histoires sans lendemain mais bien plus de s’attirer l’ire de Jacelyn, d’autant que d’autres que Namród avaient à coeur de ne pas décevoir son époux.

« Si vous buvez l’élixir de votre plein gré, vous me ferez l’affront d’en avoir besoin. » nota la reine de la cour de lumière.

Aviana avait bien assez jonglé avec les illusions dans son existence pour savoir que l’on n’abandonne pas si innocemment le contrôle de son esprit. Si l’ivresse s’acquérait sans la boisson, l’on ne se donnerait pas tant la peine de boire.

« Mon mari vous étriperait. Ou pire, il vous bannirait. Je serais obligée de me languir de votre présence des nuits durant. »

L’intonation de la reine laissait clairement à penser qu’elle souffrirait davantage de devoir se plaindre continuellement pour agacer son époux que de l’absence de Namród.

« Et privée du capitaine de ma garde, je serais alors à la merci de périls effroyables. »

Aviana rit. La reine avait un rire franc et ciselé, trop parfait pour être fortuit.

« Le scrupule ne vous sied pas. Et il est méchant de votre part de croire que l’expérience soit malheureuse. »

La reine eut un geste las, comme si elle ne faisait qu’exposer l’évidence.

« J’aimerais simplement passer plusieurs nuits en la charmante compagnie de mon merveilleux époux sans ce que celui ne me fuit comme si j’étais un monstre sorti des laboratoires de Pinxit. » mentit Aviana.

C’était en ces instants qu’Aviana se félicitait d’avoir porté la fille de Jacelyn, car sans cela, certains Faës auraient douté que le roi se soit jamais acquitté de ses devoirs conjugaux. En vérité, elle gardait trop de griefs à l’égard de Jacelyn pour poser la main sur lui sans boire l’élixir elle-même. Et si elle l’avait partagé avec Caïn, c’était parce que c’était le seul moyen d’écarter sa défiance pour l’atteindre, non pour aliéner ses propres désirs.

La reine ne redoutait pas que Namród répandit la rumeur de ses amours interdites. Ce ne serait qu’un ragot de plus comme il en foisonnait à la cour. Mais le capitaine de sa garde était suffisamment compétent pour trouver à redire sur une excursion de sa reine à la cour d’Ombre, d’autant plus si celle-ci visait à flirter de trop près avec son monarque.

« Vous n’avez pas idée du déplaisir que peut occasionner de se voir refuser ce qui vous revient de droit. »

Le capitaine de sa garde avait eu la bonne idée de ne pas se marier, là où Aviana s'y était vu contrainte par les us de cour. Elle y avait gagné en s'emparant de la couronne de son époux pour légitimer de gagner à sa cause les Faës qui le suivaient depuis le début, alors qu'elle n'était qu'une arriviste adolescente bien née des beaux quartiers.

« En cela, je suis une reine malheureuse. » déclara Aviana, dont les yeux étincelants ne clamaient que la félicité et l'autosuffisance.

« Réalisez cette petite expérience. Et si vous le désirez toujours, nous trinquerons à votre réussite. » conclut Aviana dans un sourire.

La reine s’abstint de préciser avec quoi ils trinqueraient. Après tout, il avait dit ne pas refuser le jeu de la séduction.

– Si vous buvez l’élixir de votre plein gré, vous me ferez l’affront d’en avoir besoin.
Un sourire mutin flotta sur les lèvres de Namród. Il n’avait évidemment besoin d’aucune espèce d’élixir. S’il voulait mettre la reine dans son lit, il la conquerrait par un art qu’il connaissait aussi bien que celui du combat : la séduction. Et à l’entendre, dame Aviana ne serait absolument pas contre une entrevue sur l’oreiller.
– Mon mari vous étriperait.
Comme s’il craignait la mort un seul instant ! A vrai dire…comme s’il craignait Jacelyn ! On avait enseigné la Voie du guerrier à Namród, l’art ancestral du samouraï. Il avait été battu, flagellé, jeté comme un moins que rien dans la fange de la médiocrité. On avait fait de lui un guerrier impitoyable et redoutable. Au vu de l’absence évidente de combats notables, il aurait été légitime de croire que la vie à la cour de lumière l’aurait amolli ; cela dit, son statut secret de main d’Icarus entretenait son corps comme son esprit.
– Qu’il essaye donc, fit effrontément Namród en arquant un sourcil.
– Ou pire, il vous bannirait.
Namród cligna des yeux, mimant un certain étonnement. Le bannir ? Qu’à cela ne tienne. S’abstenir de venger sa fierté bafouée ferait de sa majesté un couard. Namród s’en irait certes, mais son respect envers le souverain de la Cour s’en irait tout autant. Qu’en serait-il de ses sujets ?
– Et privée du capitaine de ma garde, je serais alors à la merci de périls effroyables.
Namród fronça les sourcils.
– Ne minimiser jamais ce qui vous menace, ma reine, dit-il d’un ton moralisateur. Nous ne sommes sûrs à nul endroit. Et les temps sont durs. Pinxit et ses sbires n’hésiteront une seule seconde à vous faire du mal…car ils se fichent bien de la paix entre les hommes et les fays.
Il se renfonça dans son fauteuil.
– Il est méchant de votre part de croire que l’expérience soit malheureuse.
La mine de Namród trahit le cheminement de ses songes. Des interrogations silencieuses de ses sourcils arqués au doute évident qu’inspirait leur froncement, on ne savait s’y tromper. Les mots de la reine sonnaient comme des mensonges. Namród Felyndrel n’en avait rien à faire. Qu’elle fasse donc ce qu’elle veut, de son élixir ! Il s’en lavait les mains. Mais justement, il était sa main…et en tant que telle, il devait veiller à sa sécurité. Or nombre de rumeurs circulaient au sujet des amourettes contre-nature de la reine et du souverain de la Cour des ombres. Namród était bien incapable de tolérer une telle chose. Qui sait de quels maléfices ce monstre pouvait bien la menacer.
– Réalisez cette petite expérience. Et si vous le désirez toujours, nous trinquerons à votre réussite.
Namród observa quelques instants la fiole de verre.
– Vous savez, commença-t-il, mes hommes ont la langue bien pendue. Ils adorent discuter d’histoires triviales et sensationnelles qui ont eu lieu durant leur tour de garde. Or je n’ai jamais entendu parler d’un soudain regain d’amour fou de votre mari envers vous. Ce qui laisse une grande question en suspens : quand avez-vous utilisé votre élixir sur lui, la première fois ?
Son sourire réapparut.
– Toutes ces intrigues me font croire que ce poison est destiné à une toute autre personne qu’à sa majesté Jacelyn de Blanval, n’est-ce pas ?

Aviana avait eu un vague froncement de sourcil devant l’impertinence de Namród. Que celui-ci puisse être plus fin bretteur que son époux, c’était fort probable mais elle n’éprouvait nul besoin de chercher à en obtenir la certitude.

La reine ferma les yeux à demi, se fendant d’un sourire enjôleur, opposant à Namród le même air angélique qu’elle réservait à son père jadis, quand affolé, il la suppliait de réfléchir à ses décisions hâtives, de ses caprices à ses noces en passant par cette enfant portée trop tôt.

« Pinxit… L’existence serait bien ennuyeuse sans eux, sans leur sotte et constante menace. Voilà qui me priverait du plaisir de votre compagnie. »

Aviana ne s’excusait pas le moins du monde de son imprudence. C’était cette flammèche folle et fragile incendiant ses veines qui l’avait poussée à défier Jacelyn et qui l’avait faite reine. Son intention première avait été de se jouer d’elle, il ne le lui avait jamais avoué mais elle l’avait lue dans ses yeux. Et pourtant, ce n’était pas pour cela qu’elle le méprisait, c’était même l’inverse et l’une des raisons multiples qui l’incitait à désirer davantage le monarque de la cour d’ombre. Il y avait plus de mérite à dompter une bête sauvage qu’à s’accommoder d’un chien savant.

« Je crains que mes galipettes avec Jacelyn ne puissent suffire à alimenter les conversations salaces de vos hommes. Non pas que nous manquions d’imagination mais tout cela doit leur sembler tristement conventionnel. »

En tout cas c’était ainsi que le vivait la reine. Séduire Jacelyn était d’une écoeurante facilité. Et pourtant, lui aussi l’abordait avec méfiance, cherchant les intentions derrière les mots et les pièges derrières les gestes. Ils avaient beau être mariés leurs étreintes étaient calculées et nullement gratuites.

« Jamais. »

Aviana était assez habile de mensonges et d’illusions pour savoir se fendre d’une once de vérité. Pourquoi diable avait-elle jugé préférable de s’entourer de serviteurs intelligents ? Jacelyn n’était pas encore ennuyeux quand elle avait pris Namród à son service.

« Si je n’ai droit qu’à une nuit de folie, je préférerais le savoir d’avance et en choisir la date avec soin. »

Elle lui rendit son sourire.

« Vous êtes trop clairvoyant. Mais si vous n’en avez pas besoin pour trinquer avec moi, je pourrais bien être tentée de rappeler mon époux à ses devoirs. »

Si elle mettait Namród dans son lit - et la perspective n’avait rien de déplaisant au demeurant - il serait en fort fâcheuse posture pour condamner les écarts de la reine, dussent-ils inclure un certain monarque d’ombre. Ce n’était pas tant qu’elle redoutait de le mettre dans la confidence. Outre le danger, son aventure avec Caïn n’avait pas la beauté raffinée qu’affectionnaient les fays, et l’insulte tacite tapie dans l’acte, dans le fait que la reine de la cour de Lumière ait put= trouver plus de satisfaction à se perde en ombre qu’à écumer sa propre cour, ne manquerait pas de le froisser.

Sujet: Re: Where the wild roses grow [Pv Namrod]

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Where the wild roses grow [Pv Namrod]

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